Est-ce le livre qui est trop riche ou le film qui est trop court ?
Le scénariste et le réalisateur ont fait tout leur possible pour garder la substance du livre et se sont concentrés sur l’intrigue principale. Pas de Quidditch, pas de S.A.L.E, la nomination de Ron et Hermione comme préfets est passée sous silence.
En fait, malheureusement, le film est très schématique par rapport au livre, beaucoup de thèmes sont à peine abordés (notamment l’Ordre du Phénix, qui est à peine représenté). Paradoxalement, certaines scènes sont au contraire absolument identiques au livre : ainsi, la scène où Hermione dit à Ron qu’il a la « capacité émotionnelle » d’une cuiller ou la première altercation entre Ombrage et Harry et ses séances de torture.
Le début du film risque particulièrement d’être dérangeant pour les fans. Le film commence en effet directement avec l’attaque des Détraqueurs : on ne voit pas l’été horrible qu’est en train de passer Harry (coupé du monde, sans nouvelles des autres, maltraité par les Dursley, etc.). Dans le livre, J.K. Rowling aborde la colère et la frustration qui bouillonnent en Harry. Dans le film, on a un peu du mal à les cerner, puisque tout ce qui est censé frustrer Harry n’est pas vraiment présenté.
Il est par exemple dommage que le film ne garde pas au moins la nomination de Ron et Hermione comme préfets, qui aurait pu souligner la jalousie de Harry et ses conflits intérieurs. Ceux-ci imprègnent tout le livre, mais ne ressortent pas vraiment dans le film… au final, ce n’est plus Harry qui est frustré, mais nous
En fait, le réalisateur avait indiqué que c’était sa volonté à lui, que le film ne montre pas Harry en colère : au lieu de le voir tout le temps crier contre les autres, il préférait montrer sa solitude, son sentiment d’abandon.
On peut dire que de ce côté-là, en revanche, c’est plutôt réussi : les scènes où Dumbledore évite le regard de Harry, et que celui-ci le force à se confronter avec lui, par exemple, sont marquantes.
Mais la grande réussite du film, c’est le bouleversement que provoque Dolores Ombrage à Poudlard et le sentiment d’injustice que provoque la mauvaise foi du Ministère de la Magie qui nie l’évidence du retour de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom. Les aspects les plus marquants du livre sont gardés et mis en scène avec brio, de la retenue de Harry à la rébellion de toute l’école contre Ombrage. Imelda Stauton, qui incarne l’infâme personnage, nous offre la meilleure performance du film (même si elle ne ressemble pas à un horrible crapaud comme dans le livre ^^) !
Evanna Lynch, alias Luna Lovegood, Natalia Tena (Tonks) ou encore Helena Bonham Carter (l’inquiétante Bellatrix Lestrange) collent parfaitement à leurs personnages et apportent beaucoup d’humour (sauf pour Bellatrix, évidemment) à ce cinquième volet plus sombre que les précédents.
L’autre point très positif du film, vous l’aurez compris, c’est une nette amélioration du jeu des acteurs. Ils n’ont de cesse de le répéter –et le réalisateur aussi- dans les interviews : même s’ils en étaient à leur cinquième film, ils ont remis en question leur jeu et ont cherché à avoir une interprétation plus réaliste. Cela se voit notamment chez Emma Watson.
Réaliste, c’est ainsi que l’on pourrait qualifier le style du film, qui se définit dès les premières minutes : peu de mouvements de caméra superflus, de changements de cadres… Le réalisateur s’est concentré sur l’histoire et sur le jeu des acteurs –puisque comme dans le livre, c’est plus les émotions qui sont mises en avant, que l’action. Le film est plus sombre mais pas plus « agité ».
Agité, il l’est malgré tout lors des scènes dans le Ministère de la Magie (même si la Salle des Cerveaux a disparu, entre autres) : le combat final est très impressionnant, notamment la lutte entre Voldemort et Dumbledore.
La mort de Sirius est quant à elle assez fidèlement représentée, même si la fin est tronquée (Harry passe très vite de l’immense tristesse à l’optimisme pour le futur : c’est un film hollywoodien, ne l’oublions pas ^^).
Petit aspect amusant : observez bien le jeu de Bonnie Wright, dans les scènes où il est question de Cho et de Harry. Elle scrute toujours ce dernier, et paraît mal à l’aise lorsque Hermione dit à Harry que Cho le dévore des yeux).
Nous avons sûrement oublié beaucoup de choses dans cette critique (que ne manqueront pas de compléter Morgane et Camille ^^). On peut malgré tout conclure de la manière suivante : les fans trouveront probablement que le film manque d’une réalisation et d’une intrigue « nerveuse », agitée, qui est si caractéristique du livre, et auront du mal avec les incohérences (citons entre autres : Mrs Figgs qui, loin de sa rage dans le livre, est juste inquiète, lorsqu’elle ramène Harry chez lui ; c’est Sirius qui montre la photo de l’Ordre du Phénix à Harry, pour lui faire plaisir, alors que dans le livre c’est Maugrey et cela mortifie Harry ; c’est Cho qui dévoile à Ombrage le secret de l’A.D à Ombrage, sous l’effet du Veritaserum… et l’histoire entre Harry et elle s’arrête là).
Mais restons positifs : le grand public appréciera le film, dynamique, impressionnant, et parfois drôle. Au pire, il leur paraîtra juste un peu rapide et certains éléments de l’histoire leur échapperont… Mais on ne peut que saluer le travail de David Yates, qui a tenté de faire un film plus « intimiste » (est-il possible de faire réellement d’une grosse production un film intimiste ? ^^) et qui a surtout fait comprendre aux acteurs que jouer la comédie, cela veut dire interpréter et comprendre ce que l’on joue, avec précision.
Mer 4 Juil - 19:54